Une douce ambiance tourangelle dans le village de Crissay sur Manse (Indre-et-Loire - 37)

Aujourd'hui, je vous conduis dans ma région, entre Sud Touraine et Seuil du Poitou, pour découvrir un  village qui est labellisé "Plus beaux villages de France".  Crissay sur Manse, à égale distance de Chinon et d'Azay-le Rideau, jouit de l'ambiance toute particulière des villages tourangeaux. On le nomme parfois "la perle de la Touraine" et, si personnellement je trouve que d'autres villages sont aussi intéressants, il mérite vraiment qu'on s'y attarde.

Dans la vallée de la Manse, un affluent de la Vienne, le village s'est développé sur un plateau calcaire où il était facile de creuser des caves et des souterrains pour protéger la population, en leur fournissant des habitations et des abris pour le bétail et les récoltes. Toute la région est truffée d'habitations troglodytes très appréciées par les touristes  qui recherchent des séjours atypiques.

Crissé qui signifie "là où se dresse une une forteresse", a vu son écriture évoluer et s'écrit désormais Crissay.  La forteresse se dresse à l'entrée du village sans avoir évolué. Elle n'a plus fière allure car il n'en reste que le donjon, érigé au XIIIe, le logis seigneurial, la chapelle et de longs murs en ruines. Elle avait un rôle important, jouant, avec celle de Chinon, un rôle protecteur en surveillant le Poitou aux mains des Anglais .

C'est probablement au cours de la guerre de Cent Ans  que le château a subi ses premières agressions mais que s'est-il passé par la suite pour qu'il nous parvienne dans cet état? On ne comprend pas son organisation.  Est-ce que de multiples projets de reconstruction n'auraient jamais complètement abouti? A-t-il subi un incendie? Aurait-il été dépecé pour fournir les pierres nécessaires à la construction du château de l'ambitieux Richelieu, comme ce fût le cas pour le château de Champigny-sur-Veude dont il ne reste plus rien? On ne sait pas. En fait on ne sait pas grand chose de son passé.

Pourtant le domaine appartint successivement à de riches et célèbres familles, les Turpin d'abord, puis la maison de Beauvau, (dont on connait l'hôtel parisien qui abrite le ministère de l'intérieur) et qui était également propriétaire du château du Rivau, proche voisin (dont je vous parlerai dans mon prochain article) ou encore la maison Choiseul, propriétaire quand à elle, des châteaux d'Amboise et de la Bourdaisière. Il me parait vraiment étonnant que ce château n'ait pas été entretenu comme l'ont été les autres biens de ces riches familles d'autant que de nombreuses maisons du village attestent de la richesse du village.  

Le village s'étire, à flanc de côteau, entre le donjon et l'église construite près de la rivière, à l'autre bout du village. Je vous emmène flâner au hasard des rues et des ruelles.

Partout, les fleurs poussent librement et égayent les maisons les plus modestes. Peu d'entre-elles sont habitées à l'année mais beaucoup sont devenues des résidences secondaires très appréciées en raison de la proximité de Tours.

Au fil des rues on découvre la mairie et l'école, une toute petite école. 

Artistes peintres, céramistes, vanniers se sont installés dans les plus belles longères. Ils attirent de nombreux touristes et il vaut mieux éviter les dimanches d'été.  

Ces maisons me rappellent le village où j'ai passé tant de vacances pendant mon enfance, c'était il y a bien longtemps!

Le village était protégé par une ceinture de remparts, juste percée de quatre portes d'entrée dont il ne reste que quelques vestiges envahis par les ronces. 

Le tuffeau est une pierre blanche tendre mais très résistante. Son ennemie est l'humidité et dans ce labyrinthe de cours intérieures et de passages couverts, elle n'en manque pas. 

Notre flânerie nous amène au Grand Carroi, la place centrale.  C'est là qu'on découvre de beaux logis qui confirment l'activité et la richesse du village. Certains ont conservé leurs fenêtres à meneaux. Ici une bignone, là une glycine ou un rosier. Voilà l'ambiance des villages tourangeaux.

La maison dite du Grand Carroi date de 1536. Elle n'a pas eu la chance d'être restaurée. Occupée par des personnes très âgées, elle se dégrade au fil des ans. Sera-t-elle sauvée un jour, je l'espère mais il faudra y investir du temps et de l'argent. Souhaitons qu'un passionné de vieilles pierres en tombe amoureux.

Les beaux logis du XVe et XVIe se succèdent le long des rues qui descendent vers l'église.  La plupart ont été bien entretenues.

En contrebas du village, près de la rivière, le seigneur Jacques Turpin de Crissay, un des premiers seigneurs connu, fit construire l'église en 1527. Elle comporte un enfeu qui abrite le tombeau de son épouse Catherine du Bellay, cousine du poète Joachim du Bellay.

Né pas très loin d'ici on peut imaginer que c'est du village semblable à Crissay auquel il pense en écrivant ces vers.

Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village

Fumer la cheminée, et en quelle saison

Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,

Qui m'est une province, et beaucoup davantage?

Au bord de la rivière, le lavoir a été remis en état. La Manse s'écoule dans un joyeux gargouillis et apporte une fraîcheur bienvenue pendant les journées chaudes de nos étés. On resterait bien un moment mais nous avons vu en arrivant une terrasse charmante parfaite pour nous raifraichir.

Nous terminons notre visite avec une adresse charmante où on peut déjeuner très simplement  des plats de la région ou simplement se rafraichir d'une boisson sirotée sous le grand noyer, face à la vallée de la Manse dans la douceur de la campagne tourangelle.

Quand je regarde ces paysages, je ne peux m'empêcher de penser à ceux qui sont nés ici, ont parcouru ces collines, embrassés ces paysages et s'en sont inspiré dans leurs écrits. Je pense bien évidemment à Rabelais né à Chinon, Du Bellay vivant au château de Gizeux, Ronsard mort au Prieuré Saint-Cosme, Balzac qui a vécu à Saché, Anatole France mais aussi à Richelieu, né à Richelieu, Voltaire qui a vécu au château des Ormes et Descartes, né à Descartes.

J'espère que cette visite vous a été agréable. Merci d'être passée me voir. Prenez soin de vous et faites de belle balades, ici, ou là.

Tanielie